dimanche 31 août 2008

CRITIQUE LIVRE : L'ombre du vent (Carlos Ruis Zàfon) : Un roman à lire jusqu'au bout (9/10)


Coup de coeur

En appelant son roman de la même façon que le livre choisi par le narrateur dans le Cimetière des Livres Oubliés, l'auteur nous propose un véritable jeu de poupées russes. Les histoires des personnages se croisent et s'entremêlent, avec leurs similitudes et leurs différences pour former un tout cohérent. On vit l'histoire à travers différents points de vue grâce à des procédés narratifs dynamiques (certains passages, voire certains chapitres où le "je" qui s'exprime n'est plus le même).

La qualité du roman réside dans le fait que le lecteur suit l'avancement de l'intrigue avec un intérêt grandissant et qui atteint son paroxysme dans les cent dernières pages. Plusieurs raisons à cela.

Tout d'abord, l'enquête que mène le narrateur est progressive et rondement menée. Il veut comprendre pourquoi ce livre qu'il a "adopté", chef d'oeuvre injustement boudé par le public, se trouve au bord de l'oubli total. Pourtant, un homme semble bien déterminé à lui prendre ce livre. Les personnages sont attachants et tout à fait crédibles.

Ensuite, nous avons affaire à un roman très visuel. Les jeux d'ombre et de lumière sont omniprésents, et l'on gardera au fond de soi quantité d'images (la maison "hantée", l'errance du personnages sous la pluie, ...) qui suscitent chez le lecteur une véritable envie d'errer tel le narrateur dans les rues de Barcelone.

Les thèmes abordés dans ce roman sont riches et nombreux.

En premier lieu, le thème de la mort est très présent, tout comme la fatalité qui l'accompagne. L'après guerre civile en très légère toile de fond ne fait qu'amplifier ce sentiment de mort partout où le narrateur se rend. L'auteur va même jusqu'à attribuer à la mort un rôle de choix, en la personnifiant derrière le personnage de Fumero, véritable incarnation de l'être à la faux. Le personnage nous apparaît cruel et quasi immortel, survivant de tous les enfers, en rejoignant tour à tour les anarchistes, les rebelles, les communistes au gré des alliances.

De manière plus générale, l'auteur nous livre une réflexion sur la vie et le fait que certaines événements influent sur nos vies de manière définitive, sur ce que la vie nous inflige comme douleurs, et sur l'impuissance que l'on connaît face à certaines situations. Le narrateur découvre au fil des ans ce que l'on a personnellement découvert en grandissant : la trahison, la cruauté humaine, la honte de soi, tout ce qui blesse l'âme.

Enfin, le livre parle de la passion de l'écriture. A travers son "Cimetière des Livres Oubliés", son personnage d'écrivain torturé et l'action même du roman qui se déroule entre autres dans une librairie, l'auteur nous communique sa passion pour l'écriture et pour les écrivains, et témoigne de l'importance de la culture écrite à une époque où on lit de moins en moins, sorte de tradition oubliée. "Un écrivain écrit pour comprendre" nous confie-t-il, pour prendre le temps de réaliser certaines choses.

Ce livre est un véritable petit bijou de narration, d'intrigue et d'aventure. On se plaît à imaginer un jour sur nos écrans de cinéma cette histoire très cinématographique.

Retrouvez cette critique sur http://www.mescritiques.com


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